Le 3 février 1999, l'appareil de ligne BAe146 de la compagnie charter Debonair quitte la Suède pour le Royaume-Uni. À son bord, des hommes d'affaires britanniques rentrent d'un congrès et l'ambiance à bord est plutôt détendue. Soudain, vers 17 h 30, alors que l'avion survole la mer du Nord, à une centaine de kilomètres de la côte anglaise, le personnel de bord constate le rayonnement d'une«lumière incandescente» semblant provenir de quelques mètres sous l'appareil.
Tout se passe alors très vite. Tandis que le pilote se met en contact avec la plus proche tour de contrôle pour déterminer la nature de la lueur, certains passagers, réalisant qu'il se passe quelque chose d'anormal, aperçoivent, à gauche de l'avion, pendant une dizaine de secondes, un énorme « appareil cylindrique de la taille d'un cuirassé et doté d'une rangée de hublots carrés».
Selon le récit de quelques hommes d'affaires qui ont bien voulu, dans les jours qui suivirent, apporter leur témoignage aux autorités britanniques de l'aviation civile (CAA), «à un moment donné, l'ovni s'est arrêté puis est reparti, dépassant l'avion à une vitesse qui devait atteindre plusieurs milliers de kilomètres à l'heure».
Pourtant, les contrôleurs aériens de Gatwick, l'aéroport du sud de Londres où s'est posé l'appareil, affirment n'avoir enregistré aucune présence anormale ni aucun autre vol dans cette zone à ce moment-là. Seul un radar militaire a repéré la trace d'un passage éclair pénétrant l'espace aérien britannique vers la même heure.
OBJECTIONS FONDÉES
Le journaliste anglais David Clarke et l'ufologue suédois Clas Svahn ont longuement enquêté sur ce qu'ils ont appelé la «rencontre Debonair». D'après leurs conclusions, il s'agirait bien d'un ovni, mais ce dernier n'aurait pas été commandé par une forme quelconque d'intelligence. Les deux analystes font en effet remarquer qu'à l'inverse des passagers qui ont clairement déclaré avoir identifié un ovni (dans le champ de vision extrêmement réduit des hublots), le personnel navigant ne précise pas avoir vu un appareil. Dans le rapport remis au CAA, il est uniquement question d'une «lumière brillante non identifiée» qui se serait dégagée un peu en dessous de l'appareil pendant dix secondes. En fait, expliquent Clarke et Svahn, « tous les passagers du vol ont parlé d'un ovni, mais il faudrait se contenter d'évoquer un éclair lumineux».
Pourtant, l'analyse de la boîte noire de l'avion a révélé l'enregistrement d'une présence par le radar météorologique de bord mais cela ne constitue en aucun cas une preuve de la trace d'un ovni. Ce radar, conçu pour déceler les masses nuageuses ou les montagnes, a pu simplement enregistrer la réflexion d'une surface brillante au sol.
Quant aux radars au sol, celui de Copenhague n'a rien enregistré compte tenu de la distance par- courue par l'avion depuis son départ et il n'a jamais été clairement établi si l'objet détecté par le radar mili- taire britannique était celui qui avait été observé par l'équipage du vol Debonair.
Compte tenu de tous ces éléments, Clarke et Svahn ont conclu que l'ovni n'était ni plus ni moins qu'une météorite. Consulté sur ce dossier, le professeur Bertil Lindblad, spécialiste suédois des phénomènes de combustion dans les hautes couches de l'atmosphère, se borna à rappeler que les météo- rites sont des roches en désintégration pouvant produire une
traînée lumineuse de gaz ionisés, donnant l'im- pression de la présence d'un ovni.
EXPECTATIVES
Cela fait plusieurs années que des incidents similaires à celui rapporté par le personnel navigant de l'appareil Debonair se multiplient. On estime à une bonne cinquantaine le nombre de phénomènes de ce type observés dans le ciel du nord de l'Europe depuis 1991, et à plusieurs centaines dans le monde. Parfois poursuivis en pure perte par des jets, ces phénomènes, quelle que soit leur origine, ont été jugés par les pilotes de ligne et les contrôleurs aériens comme pouvant représenter un indéniable danger pour la sécurité des passagers.
Alors, ces objets sont-ils véritablement des soucoupes volantes ou bien ce phénomène a-t-il une explication plus rationnelle?
Certains ufologues affirment que la majorité des témoignages d'apparitions d'ovnis en plein ciel ont probablement une explication naturelle. Il est vrai que grâce à leur expérience d'observation du ciel, les pilotes sont des témoins dignes de foi mais certains phénomènes se produisant dans l'atmosphère peuvent, malgré tout, donner lieu à de fausses interprétations ; quelques-uns sont d'ailleurs si rares qu'un pilote, aussi expérimenté soit-il, peut, en toute bonne foi, se méprendre sur leur nature.
CAUSES NATURELLES ?
C'est pendant la Seconde Guerre mondiale qu'apparaissent les premiers témoignages de «rencontres aériennes» avec des objets non identifiés. Certains pilotes militaires auraient observé d'étranges rayons lumineux dans le ciel de l'Europe.
Les pilotes de l'armée de l'air américaine avaient surnommé ces phénomènes foo-fighters (du mot « feu », fire, déformé par un personnage de bande dessinée de l'époque). Si aucune explication scientifique justifiant l'existence de ces foofighters n'a été trouvée, il est aujourd'hui généralement admis qu'il s'agissait d'un phénomène atmosphérique rare qui n'a pu être observé de façon récurrente qu'à partir de la Seconde Guerre mondiale : pour la première fois dans l'histoire, des milliers d'avions se sont mis à sillonner régulièrement le ciel.
Aujourd'hui, il existe plus de 300 compagnies aériennes dans le monde qui affrètent sans cesse des avions. Il n'est donc pas surprenant que le nombre de foo-fighters augmente sans cesse. Ces petites boules de lumière qui semblent poursuivre les avions seraient dues à un phénomène électrique d'attraction vers le métal des appareils, comme la foudre est attirée par les paratonnerres.
Pourtant, toutes les rencontres en plein ciel n'ont pas une explication aussi simple. Depuis la fin des années 1960, des ovnis ou des losanges brun foncé ou noirs ont été observés à proximité de dizaines d'avions. Au vu de ces témoignages récurrents et craignant pour la sécurité des passagers, la CAA recommanda aux pilotes des lignes régulières la plus grande prudence.
ACCIDENTS INEXPLIQUES
Leurs craintes étaient, hélas, justifiées : le 24 mars 1968, les soixante-quatre passagers du vol Aer Lingus, reliant Londres à la ville irlandaise de Cork, ont péri. Leur avion, touché par un objet non identifié, a plongé dans la mer d'Irlande. Il n'y a pas eu de rescapés. Richard O'Sullivan, inspecteur irlandais des transports, déclara en juin 1970, à l'issue d'une enquête approfondie: «La présence d'un autre appareil est indéniable. » Certes, mais quel type d'appareil est entré en collision avec l'avion ? Aucun autre avion n'a été porté disparu et, selon les recoupements effectués, aucun ne se trouvait dans cette zone à ce moment-là, du moins aucun appareil conventionnel. Sur la côte irlandaise, au cap de Carnsore où l'avion a été porté disparu, certains témoins affirment avoir vu un objet «sombre, en forme de cigare», plus tôt dans la journée...
L'avion-cargo Trislander Britten-Norman, de la compagnie Kondair a été victime d'un accident similaire. Cet avion à destination des Pays-Bas survolait, le 24 août 1984, la forêt de
Rendlesham, dans le comté du Suffolk, une région réputée pour les apparitions d'ovnis qui s'y sont produites. L'avion fut heurté par un objet lourd qui endommagea un moteur et froissa la carlingue. Heureusement, le pilote réussit à se poser à Amsterdam. Les causes de l'impact demeurent un mystère.
ÉVITÉ DE JUSTESSE
Le 15 juillet 1991, un Boeing 737 de la compagnie charter anglaise Britannia Airways, de retour de Crète, préparait sa descente sur l'aéroport de Gatwick. Soudain, un très fort bourdonnement à la hauteur de l'aile droite laissa supposer au pilote qu'un ovni avait frôlé l'avion. S'étant heureusement posé sans encombre, il supposa avoir «échappé de justesse à une collision».
Une fois au sol, on chercha même sur la carlingue des traces d'éraflures car l'ovni avait effectivement été repéré par un radar de l'aéroport sans qu'aucun code électronique ne soit détecté. La tour de contrôle l'avait vu à l'écran frôler l'avion et s'éloigner à une vitesse de 200 km/h avant de disparaître au-dessus de la Manche.
Après une enquête de douze mois, la CAA décréta que cet objet était «probablement» un ballon-sonde. Pourtant, ces ballons ne peuvent pas atteindre plus de 2 000 mètres d'altitude (celle de l'ovni était deux fois plus élevée), ils ne peuvent pas non plus atteindre une vitesse de 200 km/h, ni changer de direction aussi vite que l'objet observé. Le seul ballon-sonde lancé le jour même de Crawley, une localité située à proximité de l'aéroport, a dérivé vers l'est, puis vers le sud, à la vitesse maximale du vent ce jour-là, à savoir 70 km/h. L'ovni, lui, s'était dirigé vers l'ouest. On ne sait donc toujours pas avec quoi ce 737 a risqué la collision.
La même année, un objet pratiquement identique, également repéré par un radar au sol, est passé devant la cabine de pilotage d'un appareil Alitalia alors que ce dernier effectuait sa descente sur Heathrow, autre aéroport londonien. De la même façon, un ovni a « doublé » un 405 d'Australian Airlines, le 14 septembre 1992, au-dessus de la Tasmanie. Le 9 août 1997, un cylindre «allongé, sombre et dépourvu d'ailes s'est dangereusement approché», d'un Boeing 747 de la compagnie Swissair reliant Philadelphie à Zurich.
UN SECRET D'INTÉRÊT
On pourrait multiplier les exemples de ce type à loisir et, si l'on en croit les recherches de l'ufologue James Sneddon, de nombreux cas n'ont jamais été répertoriés. Constamment «branché» sur les transmissions radio entre les équipages et le personnel au sol, cet indiscret ufologue britannique s'est aperçu que certaines apparitions n'avaient pas débouché sur une enquête officielle de la CAA. Selon lui, les compagnies aériennes veulent éviter d'ébruiter ces affaires, de peur que cela provoque une désaffection du public pour les voyages en avion. On est donc en droit d'imaginer que ce phénomène est peut-être sous-estimé. Reste à savoir s'il s'agit vraiment d'engins extraterrestres... |