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Entrevue avec un extraterrestre...
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Un intéressant interview est réalisé avec un "petit gris", le tout filmé à la base 51...
Un enregistrement vidéo divulgué en avril 1997 met en scène un extraterrestre interviewé par deux hommes au cœur de la Zone 51. D'où vient ce document? Est-il authentique? Nous enquêtons pour connaître la vérité...

La pièce est sombre, éclairée d'une sinistre lumière verdâtre. Derrière la vitre, on distingue avec difficulté la silhouette de deux hommes. L'un porte un uniforme militaire, avec, semble-t-il, des étoiles sur les épaulettes... l'autre homme est habillé de façon plus informelle. De temps à autre, il se frotte le front avec la main. Assis côte à côte à l'extrémité d'une longue table recouverte de fils, de cordes et de micros, ils tournent le dos à la caméra. A l'autre bout de la table se tient une petite créature à la peau beige... de grand yeux noirs et brillants, une tête hypertrophiée... étrange silhouette... qui parle, répond aux questions des deux hommes.
Un voyant lumineux clignote de manière irrégulière dans l'obscurité. On dirait un appareil médical, peut-être un électrocardiogramme mesurant les battements du « cœur» de la créature.
Elle semble souffrir; elle balance d'avant en arrière sa grosse tête bulbeuse, ouvre et referme rapidement la bouche.
Soudain l'extraterrestre régurgite violemment une espèce de liquide. Deux individus en tenue médicale viennent à la rescousse du malade. L'un d'eux tient délicatement sa tête et examine ses yeux à l'aide d'un stylo-torche, tandis que l'autre place les doigts dans sa bouche, essayant visible- ment de l'aider à respirer... Mais, le film s'arrête là, brusquement.

COUP MÉDIATIQUE
Cette séquence vidéo ne dure pas plus de trois minutes. Sa diffusion en avril 1997 dans l'émission américaine Strange Universe a eu une immense répercussion dans les médias et dans les milieux autorisés. Huit ans après l'affaire Robert Lazar -ce physicien qui fit sensation en prétendant que les autorités militaires américaines étaient en train de passer au crible neuf soucoupes volantes extraterrestres-, la curiosité du public pour la fameuse Zone 51 se trouva tout à coup ravivée.
Très vite les chercheurs se querellèrent, comme ils l'avaient fait deux ans plus tôt à propos du film Autopsie d'un extraterrestre. Supercherie ? Canular? Document véritable? Les hypothèses fusèrent de tous côtés. Pour y voir plus clair, il faut suivre pas à pas le chemin sinueux qu'a emprunté la fameuse cassette vidéo pour parvenir jusqu'au bureau d'un producteur de télévision...
Tout commence effectivement sur la Zone 51, la base secrète située au Nevada (États-Unis) où l'US Air Force dissimulerait des activités relatives aux ovnis. Là, d'après le document, deux hommes non identifiés se seraient entretenus avec une créature extraterrestre mise au secret. L'interview est filmée.

LE VOL DE LA CASSETTE
La cassette est dérobée par un individu connu seulement sous le nom de «Victor». L'homme prétend être un ancien employé de Zone 51. Il affirme avoir pioché parmi des «centaines d'heures d'entretiens avec de nombreuses espèces d'extraterrestres différentes, toutes enregistrées sur le site de la Zone 51 ».Victor essaya ensuite de faire diffuser la séquence. Il contacta ainsi plu- sieurs directeurs de chaînes de télévision, dont Robert Kiviat, le producteur du documentaire américain Autopsie d'un extraterrestre: réalité ou mensonge} Comme Kiviat avait l'impression d'avoir déjà été dupé une fois, il refusa de diffuser la séquence.

Finalement c'est la société de production Rocket Pictures Home Video de Los Angeles qui se porta acquéreur de la cassette. Elle avait juste- ment en préparation une émission au sujet des programmes secrets menés par le gouvernement américain sur la Zone 51. La séquence s'y intégrerait parfaitement. Le documentaire fut diffusé en août 1997. Son titre, Zone 51 .'entretien avec un extraterrestre...
Sur la demande de Tom Coleman, le président de la Rocket, le documentaire avait été réalisé par Jeff Broadstreet, un producteur indépendant qui est aussi un passionné d'ovnis. Broadstreet voulut mener son enquête de la façon la plus impartiale.
Il contacta donc plusieurs experts et leur montra le film dans le but de recueillir leurs opinions. Parmi eux se trouvaient les ufologues et écrivains Sean Morton et Robert Dean, ainsi que deux des meilleurs techniciens d'Hollywood spécialisés dans les effets spéciaux.

LE MYSTÉRIEUX « VICTOR »
Pour Broadstreet, la seule façon de s'assurer de l'authenticité de la séquence est de remonter à sa «source», le mystérieux «Victor». On essaya donc de s'entretenir avec l'homme clé de l'affaire, mais celui-ci exigea une somme d'argent... démesurée pour une interview.
L'une des seules personnes à avoir réellement rencontré Victor est Jeff Broadstreet lui-même ; l'homme a accepté d'apparaître dans son film, mais seulement «en silhouette», afin de garantir son anonymat. «Il n'a même pas voulu me doner son vrai nom, ni me révéler quel poste il occupait dans la Zone 51. On sait seulement qu'il y a travaillé. Il m'a avoué que sa plus grande crainte était que les autorités découvrent son identité... parce qu'il craint les représailles des services secrets américains. S'il a effacé la bande sonore de la cassette avant de la rendre publique, c'est à la fois pour préserver son anonymat et celle des deux hommes qui interviewaient la créature. Victor voit dans l'homme en uniforme "une sorte d'aide de camp" et dans l'autre un "télépathe" au service du gouvernement. Mais il n'a avancé aucun élément pour étayer ses suppositions. »
Dans le documentaire, Broadstreet demande également à Victor si selon lui l'extraterrestre est mort des séquelles de ses blessures, bien visibles sur les images du film. «Je n'en suis pas certain, répondit Victor, mais par contre je suis convaincu que l'extraterrestre n'a pas pu poursuivre l'entre- tien... à la fin de la séquence, il paraît épuisé.» Enfin, à la question de savoir s'il a vu dans la Zone 51 d'autres extraterrestres vivants, Victor répond de manière très évasive:« J'en ai peut être vu à d'autres occasions...» L'interview tourne ainsi à la devinette... et finalement on n'y apprend pas grand-chose.
Après enquête, Broadstreet demeure circonspect: «Personnellement, j'ignore si la bande vidéo est authentique ou non. Mon documentaire per- met de se faire une idée en toute objectivité; la séquence y est assortie des commentaires contradictoires de plusieurs intervenants. Morton et Dean croient tous deux à l'authenticité de la cassette, tandis que les deux réalisateurs d'effets spéciaux sont convaincus qu'il s'agit d'un trucage. Pour eux, l'extraterrestre est soit une image de synthèse, soit une marionnette mécanique. »

AVIS DES EXPERTS
La communauté des ufologues est très divisée sur l'authenticité de la séquence. Les deux intervenants qui apparaissent dans le film Zone 51 : entre- tien avec un extraterrestre comptent parmi les inconditionnels. Sean Morton se dit « complètement stupéfait par le contenu de la cassette». Quant à Robert Dean, colonel de l'armée américaine à la retraite et grand spécialiste des ovnis,
il déclare : «Je m'attendais à assister à un grossier canular... mais ce j'ai vu m'a complètement décontenancé. J'ai été tellement impressionné par la force des images que j'y ai cru dès les premières secondes. »

Dean a fait plusieurs rapprochements entre les deux séquences prétendument filmées dans la Zone 51. Son opinion est faite: l'autopsie comme l'interview sont authentiques. «Dans les deux films,les créatures ressemblent étonnamment aux corps d'extraterrestres photographiés suite aux accidents d'ovnis survenus aux États-Unis. Je suis un des rares militaires à avoir eu accès à ces clichés...»
Dean croit aussi avoir trouvé la raison qui expliquerait l'incrédulité témoignée par la plupart des ufologues: «Les réactions actuelles rappellent celles des gens qui ont vu pour la première fois l'extraterrestre dans le film de l'autopsie: sous prétexte qu'il ne ressemblait pas à un « Gris typique » ou à l'extraterrestre tel qu'ils se l'imaginent, ils ont tout de suite conclu au trucage... Les même causes engendrent les mêmes effets; la créature que l'on voit dans la séquence de l'interview n'est pas non plus semblable à un Gris typique. Les ufologues ne se rendent pas compte que nous avons affaire non pas à une mais à plu- sieurs espèces d'extraterrestres. »

E.T. EN TOC ?
N'en déplaise à Robert Dean, Michael Lindemann, comme la majorité des ufologues, est d'un avis diamétralement opposé. «Il n'y a absolument rien qui puisse démontrer l'authenticité de ce "document". Ce n'est qu'un grossier trucage», a- t-il déclaré. Lindemann conteste aussi la prétendue «objectivité» du documentaire réalisé par Jeff Broadstreet ; dès sa diffusion, il appela même les producteurs pour se plaindre. «Je trouve le personnage de Victor très suspect. Son interview n'est absolument pas crédible. Les producteurs de Rocket Home Video ont monté un coup de bluff pour se faire de la publicité. »

MORALITE DE L'HISTOIRE
Comme on le voit, le débat sur l'interview de l'extraterrestre est loin d'être tranché. Et il est probable qu'il durera plusieurs années encore, comme celui qui entoure toujours la séquence de l'autopsie qui défraya la chronique il y a plus de deux ans.
À leur manière, ces deux documents vidéo illustrent certaines dérives récentes qui menacent l'ufologie. La recherche du sensationnel à tout prix -dont le vecteur idéal demeure la télévision, qui bénéficie de la plus grande diffusion- peut à terme se révéler très dommageable pour l'ufologie. Si en effet on parvient à démontrer que ces films ne sont que de vulgaires trucages, l'en- semble de la discipline perdra de sa crédibilité. Et si le doute subsiste, l'effet sera également néfaste ; les debunkers en profiteront pour remettre en cause l'efficacité et le sérieux des enquêtes menées par l'ensemble des ufologues.
De nos jours, le degré de perfectionnement des effets spéciaux -notamment l'émergence des images de synthèse en trois dimensions- oblige à considérer avec prudence tout document filmé. La règle établie dans l'ufologie veut que toute allégation soit étayée par des preuves concrètes. Or dans l'affaire de l'interview, cette règle n'est aucunement respectée, comme le souligne avec raison Lindemann. Il vaut la peine de rappeler que le journaliste George Knapp passa pratiquement un an à vérifier l'histoire de Robert Lazar avant de se décider à programmer le sujet à l'antenne. On ne peut pas dire que Broadstreet ait fait preuve d'un tel professionnalisme...
Les acteurs de l'affaire semblent avoir tout fait pour escamoter les indices qui auraient pu faire progresser l'enquête. Cassette originale introuvable, identité de «Victor» tenue secrète, refus de se prononcer de la part de Jeff Broadstreet. Loin d'être une nouvelle révélation sur les activités de la Zone 51, l'interview ressemble plutôt pour le moment à une vaste opération médiatique... très réussie. Chapeau !


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